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Le gouvernement du Salvador a pris des mesures controversées pour lutter contre le coronavirus. Quelles sont-elles ?

Comment la population est-elle affectée par le confinement ?

Au Salvador, plus de 60 % de la population n’a pas d’emploi formel. Ce sont des travailleurs journaliers, des vendeurs ambulants de nourriture, de vêtements, de bonbons, etc. Ces personnes gagnent leur vie au jour le jour. Comme ils sont en confinement obligatoire, ils ne peuvent pas travailler: ils n’ont ni argent ni nourriture et ne peuvent pas non plus couvrir leurs autres besoins fondamentaux. En outre, depuis le 14 mai, le gouvernement a interdit les transports publics, ce qui rend les achats essentiels encore plus difficiles pour les personnes habitant loin de magasins.

La situation a été aggravée par l’arrivée de l’hiver et ses effets, en particulier sur les familles les plus vulnérables. Deux tempêtes tropicales ont touché le pays : Amanda et Cristobal ont causé jusqu’à présent plus de 20 morts par inondations et glissements de terrain. Elles ont aussi causé des dommages tels que la destruction de maisons et de biens ; des routes sont bloquées à cause des débris.

Comment vous adaptez-vous, vous et votre équipe, tant sur le plan professionnel que personnel ?

Nous planifions chaque semaine en fonction des jours où il est autorisé de sortir. Nous venons à tour de rôle au bureau, ce qui complique les processus. Par exemple, le comptable arrive et fait la comptabilité et émet les chèques. Le lendemain, j’arrive pour vérifier la comptabilité, signer les chèques et transférer les fonds aux projets. Le surlendemain un autre collègue arrive pour réaliser les démarches auprès de la banque.

Le personnel technique travaille davantage à partir de chez eux. Nous organisons des réunions en ligne, préparons et révisons des documents, suivons la situation politique, économique et sociale du pays. Nous nous coordonnons pour l’aide humanitaire d’urgence avec la Direction du développement et de la coopération suisse (DDC). Des réunions en ligne ont lieu avec les partenaires et ceux-ci effectuent le suivi des bénéficiaires par WhatsApp. Des formations en ligne, des campagnes de sensibilisation via les réseaux sociaux, les coopérations avec les municipalités peuvent se poursuivre.

Personnellement, travailler à la maison reste un défi, car il faut improviser. Heureusement qu’internet facilite la communication. Mais ça reste inhabituel : soudain vous travaillez et le chat sort du sac de l’ordinateur portable ou vous devez vous occuper de quelqu’un. C’est plus compliqué pour les collègues qui doivent s’occuper de leurs enfants tout en travaillant à domicile.

Les Salvadorien-ne-s brandissent maintenant des drapeaux blancs pour montrer qu'ils souffrent de la faim…

Au début de la quarantaine en mars, le gouvernement a accordé une prime de 300 dollars aux familles qui n’ont pas d’emploi formel et qui sont en situation de vulnérabilité. Selon notre suivi et celui de nos partenaires, cette prime n’a pu couvrir qu’environ 50% des personnes dans le besoin. Les maires et le gouvernement central ont livré de la nourriture, mais ils ne sont pas en mesure de couvrir toute la population qui en a besoin. Comme nous sommes en confinement obligatoire depuis plus de 70 jours, les familles les plus vulnérables ne peuvent pas travailler et n’ont plus d’argent, ni de nourriture. Elles ont placé des drapeaux blancs sur les fenêtres pour demander une aide alimentaire.

Selon vous, quels seront les impacts de la crise pour le pays sur le long terme ?

Les conséquences vont être très lourdes. La Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) s’attend à une récession de 3% cette année, tandis que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) prévoient une contraction de 4,3 % et 5,3 %, respectivement.

Une récente étude de la Banque interaméricaine de développement (BID) évalue que l’impact des mesures COVID et la récession économique auront des répercussions importantes sur les ménages salvadoriens et que le nombre de pauvres pourrait augmenter de 600 000 personnes (le Salvador compte 6,5 millions d’habitant-e-s). Même avec les transferts monétaires, la BID estime que la population vulnérable atteindra un total de 46,4 % de la population, dont la majorité sont des jeunes et des femmes. La BID estime également que la perte d’emplois formels atteindra 15,5 % à long terme.

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