Place financière suisse : avec les bellicistes
La Suisse est la place financière la plus opaque du monde, derrière les États-Unis. C'est ce que révèle le nouvel indice de l’opacité financière du réseau pour la justice fiscale (TJN). Notre pays stagne dans la lutte contre l'évasion fiscale internationale, le blanchiment d'argent et la corruption — cela lui est aujourd’hui préjudiciable dans la recherche des fonds sanctionnés des oligarques russes. Plus de transparence est nécessaire de toute urgence.
La Suisse est la place financière la plus opaque du monde, derrière les États-Unis. C’est ce que révèle le nouvel indice de l’opacité financière du réseau pour la justice fiscale (TJN). Notre pays stagne dans la lutte contre l’évasion fiscale internationale, le blanchiment d’argent et la corruption — cela lui est aujourd’hui préjudiciable dans la recherche des fonds sanctionnés des oligarques russes. Plus de transparence est nécessaire de toute urgence.
Selon les calculs du TJN publiés aujourd’hui, la Suisse abrite l’une des places financières les plus attrayantes pour les fraudeurs du fisc, les blanchisseurs d’argent, les financiers du terrorisme ou les politiciens corrompus. Car non seulement les banques établies chez nous gèrent autant d’avoirs étrangers que nulle part ailleurs dans le monde — selon l’Association suisse des banquiers (ASB), il s’agit de plus de 3’600 milliards de francs — mais la place financière suisse fait toujours partie des plus opaques au monde, malgré toutes les réformes de la dernière décennie.
Ce constat pose doublement problème dans le contexte de la guerre d’agression de la Russie en Ukraine, selon Dominik Gross, expert financier chez Alliance Sud, le centre de compétences suisse pour la coopération internationale et la politique de développement : « Premièrement, la Suisse ne dispose pas des lois qui permettraient aux autorités de rechercher activement une grande partie des avoirs sanctionnés des oligarques russes. Les analyses du TJN le mettent en exergue ». D’après le Secrétariat d’État à l’économie (Seco), seuls 6,3 milliards de francs d’avoirs russes sont actuellement bloqués en Suisse, et depuis avril, les banques ont déjà libéré plus d’un milliard. Même si, selon l’ASB, 150 à 200 milliards d’avoirs russes se trouvent en Suisse.
Comme notre pays n’entretient toujours pas d’échange automatique de renseignements (EAR) sur les données des clients bancaires avec de nombreux pays en développement, les fraudeurs fiscaux de pays non membres de l’EAR n’ont en outre toujours pas grand-chose à craindre dans les banques suisses. Dominik Gross : « Ils y cachent des fonds au fisc de leur pays d’origine, de l’argent dont celui-ci aurait urgemment besoin pour surmonter la crise alimentaire déclenchée par la guerre en Ukraine. »
Le Parlement doit agir
Malgré un clair besoin d’agir, le Conseil fédéral reste inactif. Le Conseil national et le Conseil des États pourraient toutefois y remédier bientôt :
• Une motion multipartite au Conseil national exige du Conseil fédéral un projet de loi pour plus de transparence, afin que les véritables propriétaires de sociétés boîtes aux lettres et les profiteurs de structures offshore soient au moins connus des autorités.
• Via d’autres interventions, des conseillers nationaux et aux Etats veulent savoir du Conseil fédéral comment il entend à l’avenir détecter et confisquer les avoirs sanctionnés et demandent la création d’une Task Force suisse ou l’adhésion de la Suisse à la Task Force international qui recherche activement les avoirs russes.
• Un postulat de la Commission de politique extérieure du Conseil national demande au Conseil fédéral de présenter un rapport expliquant comment il entend accroître à l’avenir la transparence des flux financiers entrant et transitant dans notre pays.
Pour plus d’informations :
Dominik Gross, expert en politique financière chez Alliance Sud : 078 838 40 79 ; dominik.gross@alliancesud.ch