RBA: pas si responsable que ça

L'initiative pour la durabilité de l'industrie électronique n'a pas encore amélioré de manière significative les conditions de travail dans les usines. Nous demandons des améliorations concrètes et efficaces.

Qu’est-ce que la Responsible Business Alliance ?

La RBA a été initiée en 2004 par un petit groupe de marques électroniques et de grands fournisseurs sous le nom de « Electronic Industry Citizen Coalition » (EICC) afin de créer une norme pour le secteur en matière de critères sociaux, environnementaux et éthiques dans la chaîne d’approvisionnement des produits électroniques. Aujourd’hui, plus de 200 entreprises font partie de la RBA, principalement du secteur de l’électronique mais également des secteurs du jouet, de l’automobile et de la grande distribution. Ces entreprises réalisent un chiffre d’affaires annuel de 7,7 billions de dollars et emploient plus de 6 millions de personnes. Parmi les membres, on compte des marques électroniques comme Apple, Samsung, Lenovo ou Logitech, ainsi que BMW, Tesla ou des fournisseurs comme Foxconn ou Pegatron.

La RBA impose à ses membres des normes sociales et environnementales par son code de conduite (Code of conduct). Ce code proscrit entre autres le travail forcé, l’emploi de mineur·e·s, les heures supplémentaires excessives, la discrimination ainsi que les bas salaires illégaux. Il établit également des exigences en matière de santé et de sécurité au travail.

La conformité de ses normes est contrôlée principalement pas des audits réalisés par des tiers dans le cadre du Validated Assessment Program » (VAP). Pour devenir membre à part entière de la RBA, les entreprises doivent passer par cette évaluation VAP.

Quels sont les problèmes de la RBA?

Plusieurs raisons expliquent pourquoi la RBA ne réussit pas à garantir le respect de ses propres normes sociales par ses membres et à améliorer de manière durable les conditions de travail :

  1. Audits sociaux inadéquats : les audits sociaux du VAP sont trop superficiels et manquent de confidentialité lors des entretiens avec les travailleuses et les travailleurs. C’est pourtant une clause indispensable pour identifier les problèmes systémiques à l’origine des conditions de travail injustes.
  2. Absence de représentation des travailleuses et des travailleurs : la RBA est une initiative totalement issue de l’industrie ; le conseil d’administration est uniquement composé de dirigeant·e·s des entreprises membres. Il n’y pas de représentant·e·s indépendant·e·s des travailleurs·euses, ni représentant·e·s de la société civile des régions où les membres de la RBA produisent leur marchandise.
  3. Conflits d’intérêts : la RBA est financée par les cotisations annuelles des membres, ce qui crée un conflit d’intérêts fondamental ; d’une part la RBA souhaite exercer une fonction de surveillance dans le secteur et d’autre part, elle n’a aucun intérêt financièrement parlant à exclure les membres contrevenants aux normes.
  4. Absence de mise en œuvre des normes : bien que la RBA établisse des directives, elle ne dispose d’aucun pouvoir pour les faire respecter. Au final, les entreprises s’autorégulent. Une situation particulièrement problématique dans les régions où les lois concernant le travail sont peu appliquées.
  5. Manque de transparence : les résultats des audits VAP ne sont pas rendus publics, tout comme les informations sur les communications avec la RBA, ses partenaires ou les organisations de la société civile.

Le code de conduite lui-même présente de grandes faiblesses. Il n’est par exemple pas exigé des membres qu’ils rémunèrent leurs employé·e·s avec des salaires décents, permet des semaines de travail de 60 heures et limite le droit à la représentation des travailleuses et des travailleurs à des formes « conformes à la loi ». Ce dernier point est un problème dans les pays où la liberté syndicale est légalement restreinte.

Nos revendications à la Responsible Business Alliance 

Même si la RBA n’est pas seule responsable de résoudre les problèmes systémiques de l’industrie, elle dispose en tant que « la plus grande coalition industrielle au monde dédiée à la conduite responsable des entreprises dans les chaînes d’approvisionnement mondiales » d’un puissant levier. Pour qu’elle puisse être à la hauteur de ses ambitions et des droits des travailleuses et des travailleurs, nous recommandons à la RBA de mettre en place les mesures suivantes :

  1. Augmenter la transparence des processus internes.
    Y compris la publication des résultats des audits sociaux et des méthodes utilisées.
  2. Mettre en place des sanctions pour les membres qui enfreignent les directives.
    Les violations du code de conduite ne doivent pas demeurer impunies. Les entreprises doivent être contraintes de mettre en place des mesures correctives dans un délai déterminé et, en cas de récidive, être exclues.
  3. Réagir rapidement et publiquement aux informations provenant de la société civile mettant en lumière des conditions de travail abusives chez les membres.
  4. Mettre en place des mécanismes de plaintes indépendants pour les travailleuses et les travailleurs.
    Comme des hotlines et des formations adéquates pour le personnel.
  5. Créer une représentation des travailleuses et des travailleurs au sein conseil d’administration de la RBA.
    La RBA doit réserver au moins deux sièges à des représentant·e·s des travailleurs·euses ou à des organisations de la société civile.
  6. Introduire un rapport axé sur les résultats pour les entreprises membres.
    Conformément aux nouvelles règles de l’UE sur les rapports de durabilité, tous les membres de la RBA doivent indiquer clairement les mesures mises en place pour assurer le respect des droits humains dans leur chaîne d’approvisionnement et l’efficacité de ces mesures.

Les préoccupations des travailleuses et des travailleurs doivent être prises en compte pour que des améliorations soient effectives. C’est précisément l’objectif de nos recommandations, en accord avec ce que la RBA prétend défendre : garantir des conditions de travail sûres, des pratiques commerciales responsables et un traitement digne des travailleuses et des travailleurs.

RAPPORT SUR L'ELECTRONIQUE

Lisez notre rapport sur les conditions de travail précaires dans les usines d'électronique en Asie.

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